Éditorial FEF#19

Anthony Vitorino - crédit photo Stéphane Prévost

Alors qu’au XVIIIe siècle, la Révolution industrielle commence en Angleterre, c’est moins d’un siècle plus tard qu’elle se diffuse en France. Les industries textiles et métallurgiques se développent, suivies par les industries chimiques, électriques et automobiles. Une forme de “quoi qu’il en coûte” de l’époque. À la différence, qu’au XIXème siècle cette Révolution industrielle s’apparente à une histoire d’amour naissante entre les décideurs et les fabricants. Vous savez ce moment où l’on est convaincu que c’est la bonne ! C’est pour la vie ! Par conséquent, nous sommes prêts à tous les investissements possibles.

Le résultat ne se fait pas attendre, au cours de la première moitié du XXe siècle, l’industrie française connaît un essor spectaculaire. Après les années de la reconstruction post Seconde Guerre mondiale. La France devient la cinquième puissance industrielle mondiale.

Cependant, au cours des décennies suivantes, l’industrie française est confrontée à une concurrence internationale accrue, à des crises économiques et à des restructurations industrielles qui affectent gravement certaines régions. La lune de miel s’achève. L’herbe semble plus alléchante ailleurs… Les décideurs ne regardent plus celle qui les a accompagnés au cinquième ciel de la puissance industrielle mondiale.

Depuis les années 1990, une longue thérapie de couple, décideurs versus industrie française, a débuté. Les premiers s’accordent à lui déclarer que leur amour est intact mais que la tentation de frivolité est trop forte. Tandis que la seconde se sent délaissée, parfois trahie. Alors, à coup de bistouris, elle adopte progressivement des poli- tiques de modernisation industrielle, se concentre sur les technologies de pointe et se développe à l’international, pour s’offrir une nouvelle jeunesse et redevenir aussi séduisante qu’au début de la relation amoureuse.

L’industrie française est résiliente. Elle sait comment rebondir, comment se réinventer, comment s’adapter aux changements de marché. Elle est comme une rose qui pousse dans un champ de béton, qui trouve toujours un moyen de fleurir malgré les obstacles.

Depuis une quinzaine d’année, les amis de l’industrie française, les militants du made in France ont rallié la cause de cette dernière pour l’aider à regagner le cœur des décideurs. Chacun y va de son argument pour vanter ses mérites et montrer tout ce dont elle est capable. Cette formidable solidarité est une fois de plus démontrée autour de la mascotte Cocorifeu lancée par la certification Origine France Garantie. Industriels, designers, fournisseurs, consommateurs, journalistes se re- groupent derrière elle pour prouver aux décideurs à travers ce symbole de la renaissance industrielle que tout est encore possible. J’en profite ici pour remercier Natacha Polony de signer amicalement la Carte Blanche de ce numéro. Tous sommes réunis pour que l’industrie française puisse continuer à fleurir. Elle a besoin du soutien de ses partenaires. Elle a surtout besoin que les décideurs continuent à croire en elle, à investir en elle, à la promouvoir et à la défendre.

Alors, chers décideurs, ne négligez pas l’industrie française. Elle a besoin de vous, de votre attention, de votre soutien. Rappelez-vous pourquoi vous êtes tombés amoureux d’elle. Rappelez-vous de sa qualité, de son savoir-faire, de son expertise. Ne la laissez pas souffrir seule. Deux siècles de mariage ne peuvent pas se voir méprisés.